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 Jo Sony ( Alphonse Erhard ) Accordéoniste multi-instrumentiste. Né en 1937 à Mulhouse

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Source 
http://blogs.mondomix.com/accordeon.php/2010/04/20/jo-sony-l-incroyable-artiste (blogs fermé)

Du cirque au tennis de table, en passant par l’accordéon, Jo Sony sera toujours un enfant de la balle !

Le plus Alsacien des musiciens du Massif central s’appelle Alphonse Erhard, mais tout le monde le connaît davantage sous son nom d’artiste : Jo Sony. Un nom qui faillit lui causer quelques ennuis il y a une dizaine d’années. Il nous raconte cet incident : « J’ai été remarqué par Pierre Carrel, l’un des directeurs artistiques de la firme CBS, pendant la “Quinzaine auvergnate 1965” au Concert Pacra car je faisais partie des Troubadours de Jean Ségurel, la vedette du spectacle. Nous imitions les Beatles. En plus, je faisais des acrobaties, juché sur les épaules de mon patron, jouant les jambes en l’air de la trompette, du saxo et de l’harmonica ! Cela dut lui plaire parce que, huit jours plus tard, Carrel me faisait signer un contrat pour enregistrer des disques. Sony Music France racheta CBS vers la fin des années 1980 et réédita un de mes albums en CD après que Pierre Carrel, disparu il y a trois ans, eut pris sa retraite en 1990. Seulement, les nouveaux dirigeants me sommèrent de changer de nom puisque, selon eux, un artiste étant chez Sony ne pouvait pas porter le même nom. J’ai refusé et j’ai eu gain de cause, puisque je me prénommais déjà ainsi, bien avant que la firme japonaise ne vienne s’implanter en France ! Et puis, Sony, ça “sonne” quand même mieux qu’Alphonse ! »

Aujourd’hui, Jo Sony pourrait prendre à son tour une retraite bien méritée, mais son dynamique tempérament le lui interdit. Artiste aux multiples facettes, toujours sur les routes pour animer des bals ou galas, il n’est pas souvent chez lui, dans la coquette maison d’Egletons (19) qu’il s’était fait bâtir il y a une quarantaine d’années et qui est toujours en perpétuel chantier. Avec Simone, son épouse, il adore construire, aménager, améliorer son habitat et son environnement. Et comme c’est un bec fin, il se distingue aussi comme un excellent cuisinier.
Cet enfant de la balle l’est à plusieurs titres. Avant la guerre à Mulhouse en Alsace, ses parents avaient monté un numéro d’acrobates avec leurs deux fils, Jack et Sony : la Troupe Alphonso qui se produisit dans des cirques. Quand l’Alsace fut annexée en 1940 par les nazis, Sony et son frère aîné, encore gamins, échappèrent de peu à l’enrôlement dans les jeunesses hitlériennes grâce à leur mère, qui avait gardé sa nationalité suisse et les expédia dare-dare dans ce pays resté neutre où ils restèrent jusqu’à la Libération de l’Alsace au début de 1945. Enrôlé de force dans la police de Mulhouse, M. Erhard père milita dans la Résistance au péril de sa vie.
À la fin du conflit, les deux adolescents regagnèrent Mulhouse et se lancèrent à fond… et dans le cirque et dans la musique. « Je n’oublie pas que je viens du cirque, dit Jo Sony, j’y reviens toujours avec joie car j’aime son ambiance, son odeur et la solidarité entre tous les artistes. Jean Brun m’a permis, il y a quelque temps, de renouer avec. Et puis comme dans un cirque il y a toujours de la musique, j’ai consacré quelques-uns de mes récents enregistrements à ce style. J’ai été voltigeur, clown musical, apprenant à jouer de l’accordéon, du xylophone, du glockspiel (1), de la scie musicale, du cor des Alpes et des cuivres, faisant aussi un numéro musical sur des verres remplis d’eau ! »
Le parcours musical de Jo Sony est un véritable roman. Dès leur retour en Alsace, l’Orchestre Alphonso est créé. Papa tient la batterie, maman est à l’accordéon, Jack à la guitare. Et Sony joue de nombreux instruments tout en faisant des contorsions, d’où son surnom de Sunny-Boy qui allait devenir Sony. La musique est une chose, et le sport une autre. Au conservatoire de musique de Mulhouse, il obtient le premier prix de saxophone alto tout en s’entraînant au club athlétique de la ville en vue de devenir moniteur et enseignant éducatif de sport. Il lui est resté un goût immodéré pour les combats de boxe.
Mais voilà, il a 20 ans en 1957 et le contingent étant appelé pour combattre en Algérie, Jo Sony y sera envoyé pour accomplir son service militaire où il va pratiquer le close combat. Il en reviendra heureusement sain et sauf en 1958 pendant que Jack Erhard devait répondre favorablement à une petite annonce parue dans La Revue de l’accordéoniste. Celle-ci mentionnait qu’un chef d’orchestre réputé de la Corrèze était à la recherche d’un guitariste professionnel. C’était Jean Ségurel. Lorsque Jo Sony rentra d’Afrique du Nord, Jack faisait déjà partie des Troubadours depuis quelques mois. Il écrivit à son frère que le célèbre accordéoniste avait maintenant besoin d’un bon trompettiste et saxophoniste. Jack ayant vanté les mérites de Sony, celui-ci acheta aussitôt une trompette et après avoir dit au revoir à ses parents, prit le premier train pour Egletons où l’attendait Ségurel. Il ne devait plus le quitter.

Quand en 1960 les deux frères apprirent qu’il y avait un festival de jazz à Antibes, ils lui demandèrent la possibilité d’y concourir : « J’en suis revenu avec le 1er prix de jazz moderne au vibraphone. Puis j’ai aussi joué du sax et de la clarinette dans la fosse d’orchestre du théâtre de Mulhouse , sous la direction d’Henri Thomasi. Je crois que, après m’être marié à Marseille, je ne me suis plus guère arrêté depuis ce temps-là. J’ai vécu quelque temps à Chaumeil avec quelques autres musiciens. J’avais réussi à mettre quelques sous de côté. Comme je me plaisais beaucoup en Corrèze, j’ai décidé que je ne reviendrais pas en Alsace. J’ai pu acheter un terrain à Egletons sur lequel j’ai fait bâtir une maison, celle où je vis toujours aujourd’hui. Entre-temps, mon frère Jack avait quitté Jean Ségurel pour fonder son propre orchestre à Brive-la-Gaillarde. Après les “Quinzaines auvergnates” au Concert Pacra, Ségurel prit sa retraite en 1967. J’étais donc libre de former le mien. Pour cela, bien que je savais jouer de nombreux instruments de musique, c’est l’accordéon qui devait prédominer, bien que ce dernier entamait sa traversée du désert. »

Modeste, Jo Sony ne dit pas qu’il allait se trouver à la tête d’un très brillant orchestre de bals et de variétés composé d’une dizaine de musiciens. Il devait enregistrer plusieurs albums d’accordéon chez CBS et tourner dans la France entière pendant presque vingt ans. Ce fut aussi la période des galas en Europe : Angleterre, Suisse, Belgique et, pendant trois ans, les fêtes franco-allemandes dans le secteur français de Berlin-Ouest, puis une participation à un festival de folklore à Rio de Janeiro. Et comme sommeille en lui la fibre alsacienne, il monta en parallèle une formation typique pour animer les traditionnelles fêtes de la bière en France et même en Allemagne. Ce fut Karl Erhardt und sie Orchester !

Plus Auvergnat que Jo Sony, tu meurs. Constatant comme beaucoup de ses collègues le peu de cas que faisaient les grosses maisons de disques à l’accordéon, il a fondé il y a une vingtaine d’années son édition musicale et son propre label de disques : Les 3 Fleurs. « Ces trois fleurs, je les cultive dans mon jardin d’Egletons, dit-il. Ce sont ma femme Simone, ma fille Sonia et la troisième… c’est moi ! »

Jo Sony sait faire vibrer les anches de ses cabrettes afin de leur donner l’accent auvergnat. Il a enregistré quelques-uns parmi les meilleurs disques folkloriques du Massif central, comme il est toujours resté un accordéoniste fidèle à Maugein. Il possède sans doute un atout supplémentaire par rapport à d’autres musiciens : vu qu’il sait jouer de quasiment tous les instruments, c’est lui qui assure aussi bien les orchestrations que les interprétations. Jo Sony, c’est bien “l’homme-orchestre” de la Corrèze ! Auteur, compositeur, interprète, cela lui a valu d’être admis à la Sacem (2) il y a quarante-cinq ans et promu sociétaire définitif il y en a vingt-cinq. Sa meilleure promotion fut sans doute d’être cité pendant trois ans de suite dans le fameux “Livre Guinness des Records” pour avoir joué de cinquante-neuf instruments de musique différents. Un record homologué par huissier en 1986 à Felletin (23).

 

Jo a toujours des projets et c’est un perfectionniste : « Je viens de sortir “Alsace en Fête”, un CD de musique folklorique alsacienne. Contrairement à ce que tout le monde croit, c’est le premier de ce genre que j’enregistre. Cette année, en matière de musette, après avoir publié “Hit-parade de l’accordéon” et “Plaisir d’accordéoniste”, je vais bientôt sortir “Musette au cœur”. J’aime travailler en studio et j’y passe de longues heures. Si ça ne me convient pas, je recommence tout. Je travaille actuellement avec Sébastien Perrin. C’est un remarquable technicien et dont le studio situé à Domerat, près de Montluçon, est très performant. Si un accordéoniste manque de moyens, il peut quand même enregistrer aujourd’hui un CD en utilisant un synthé, lequel peut remplacer de nombreux instruments, mais la musique électronique manque d’âme et d’humanité. C’est pourquoi je préfère privilégier les instruments acoustiques dans mes disques. »

ly: Times New Roman;">Jo Sony a aussi plusieurs violons d’Ingres : la photographie, dont il commence à devenir très “pro”, la pétanque et la cuisine. Il y a une quinzaine d’années, n’avait-il pas été couronné à Limoges par un prix culinaire décerné par une association de journalistes gastronomes pour une “timbale de langoustines à l’orientale” ? Ce qui lui plaît, c’est de concocter un bon repas en invitant chez lui des amis. Mais son hobby principal est sans aucun doute le tennis de table. Depuis septembre 2005, il suit un entraînement très poussé deux fois par semaine en Corrèze. Il dispute des matches importants, ce qui lui permet d’être souvent qualifié pour participer à des championnats. Déjà enfant de la balle, il le devient encore un peu plus dans la pratique de ce sport. Jo Sony, musicien incontournable, n’a pas fini de nous étonner.

Propos recueillis par Roland Manoury

(1) : Glockspiel = grelots de différentes tonalités, accrochés à un portique.

(2) : Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique.